Des substances chimiques à l'origine des pubertés précoces ?

L’âge de la puberté chez les filles n’a cesse de diminuer. Il existe aujourd’hui de nombreux cas de puberté précoce, survenant avant 10 ans. Une étude américaine a tenté d’associer cette perturbation de la survenue de la puberté avec l’exposition à des substances chimiques couramment retrouvées dans l’environnement.

Depuis plusieurs années, les scientifiques ont constaté la diminution de l’âge de la puberté chez les filles. En effet, alors que cet âge est passé en moyenne de 17 à 14 ans entre 1850 et 1950, il existe aujourd’hui de nombreux cas de puberté précoces survenant avant l’âge de 10 ans ! Au delà de l’obésité, régulièrement mise en cause, les chercheurs du Docteur Mary Wolff du Mount Sinai Medical Center suspectent un lien avec l’exposition aux polluants. Parmi eux, on retrouve les perturbateurs endocriniens comme les phénols, phtalates et

phytooestrogènes.
Ces molécules, d’origine extérieure et que l’on peut trouver dans les eaux douces, l’alimentation ou même

dans des cosmétiques, vont venir moduler l’équilibre hormonal en mimant l’action d’hormones endogènes. L’équipe de scientifiques a cherché à tester l’hypothèse selon laquelle une exposition à ces agents chimiques influencerait la survenue de la puberté ainsi que de complications survenant plus tard dans la vie.Pour y parvenir, l’équipe a effectué des prélèvements urinaires chez 1151 filles âgées de 7 à 9 ans afin d’analyser les concentrations en phénols, phytooestrogènes et en dérivés issus de la métabolisation des phtalates. Puis, un an plus tard, les chercheurs évaluaient l’évolution d’une puberté éventuelle, en observant le développement des glandes mammaires et des poils pubiens.Après analyses, les urines ont montré que les 3 familles de substances étaient largement présentes dans la population étudiée, et qu’une exposition forte à certains de ces composés serait reliée à un développement précoce des seins. Selon Mary Wolff, “nos recherches ont montré une connexion entre les substances chimiques auxquelles ces filles sont exposées quotidiennement et un développement avancé ou retardé de la puberté“.

D’autre part, les phtalates que l’on retrouve dans de nombreux produits cosmétiques (vernis à ongle, laques, shampooings …) seraient impliqués dans une croissance précoce des poils pubiens et un développement des glandes mammaires. Tandis qu’une combinaison entre un phénol, un phytooestrogène et plusieurs phtalates -servant entre autres à la fabrication de plastiques- retarderait quant à elle la puberté. Le Dr Wolff suppose qu’il y “aurait une période de vulnérabilité pendant le développement des glandes mammaires“. En outre, les taux de ces molécules sont susceptibles d’augmenter avec l’âge, retrouver des concentrations similaires à des âges si jeunes pourrait avoir des conséquences néfastes et entre autres “influencer le risque de cancer du sein à l’âge adulte“.Une autre étude montrait déjà l’influence des perturbateurs endocriniens chez la femme enceinte. Après mesure des concentrations urinaires en phtalates chez 177 femmes enceintes au 3è trimestre de leur grossesse, les enfants nés de ces mamans devaient effectuer des tests comportementaux et cognitifs à plusieurs reprises entre l’âge de 4 à 9 ans. Tests évaluant la capacité à mémoriser un mode d’emploi ou à contrôler ses émotions par exemple. Les chercheurs en avaient conclu que plus les concentrations en phtalates étaient élevées et plus les résultats aux tests étaient décevants.Malgré ces indices, cette piste divise. Lors d’un colloque organisé à Rennes il y a quelques jours au sujet des perturbateurs endocriniens, les scientifiques ont conclu que “les indices existent, mais ne sont pas encore suffisants aux yeux des chercheurs pour établir un lien direct de cause à effet“. La puberté précoce est-elle due seulement à des facteurs chimiques ou n’est-elle pas plutôt d’origine multifactorielle ?Frédéric Tronel
Sources :
– “Investigation of relationship between urinary biomarkers of phytooestrogènes, phtalates and phenols and pubertal stages in girls“ Mary Wolff et coll., Environnemental Health Perspectives, 22 mars 2010,

résumé accessible en ligne
– “Prenatal phtalate exposure is associated with childhood behavior and executive functioning“ Stephanie M. Engel et coll., Environnemental Health Perspectives, 8 janvier 2010,

résumé accessible en ligne
Photo : TEICH/CARO FOTOS/SIPAClick Here: cheap Cowboys jersey